
Pas une journée ne s’écoule sans que l’on ne parle des étrangers.
L’Etranger, cet Autre par définition différent de nous, hostile, menaçant notre mode de vie, nos acquis sociaux, nos valeurs. Pas une semaine sans que des hommes ou femmes de pouvoir, journalistes ou politiques, ne fassent référence à l’Etranger.
Peu à peu, la figure de l’immigré des années 60 a laissé sa place, dans le discours, aux « français d’origine immigrée », ces citoyens de seconde zone qui traînent partout avec eux leur pedigree comme pour mieux souligner cet « échec de l’intégration » avec lequel on nous rabat les oreilles à longueur de journée. Transition conceptuelle qu’ont théorisé Mr Zemmour, Finkielkraut et leurs associés, ces prophètes du péril vert imminent, ces adeptes de la cinquième colonne. La pirouette permettant au passage de passer sous silence le vrai problème, le problème social qui sévit dans ces territoires oubliés de la République.
L’Etranger en 2016, c’est souvent ce jeune (ou moins jeune) de banlieue, musulman, dont les parents ou grand-parents sont originaires d’Afrique ou du Maghreb.
Obsédés par leurs névroses identitaires, les penseurs réactionnaires ont réussi à imposer dans le débat public que chaque homme aux responsabilités ou y prétendant ait à se prononcer sur l’Islam de France, le voile, la mode islamique, la viande hallal… Tous ces débats sont légitimes, certes, mais ne pèsent rien face à la grande précarité, à l’exclusion sociale, aux inégalités scolaires, ces facteurs qui empêchent à un grand nombre de français issus de ces quartiers de s’en extraire.
Etre de gauche, ce n’est pas nier les difficultés liées au poids des cultures, ni le danger que représentent certains fondamentalismes religieux. Etre de gauche, ce n’est pas non plus être complaisant à l’égard de ceux qui menacent nos valeurs. Mais être de gauche, c’est comprendre que les clés du problème et leurs solutions sont avant tout sociales, que le terreau sur lequel prospèrent un certain nombre de fléaux contemporains – la radicalisation en premier lieu – est avant tout fait de misère sociale et d’exclusion.
Si on me demande qui est l’Etranger, je répondrais qu’il s’incarne en toutes ces personnes qui fuient leurs responsabilités citoyennes en se soustrayant à l’impôt. Car lorsque l’on parvient à se hisser hors de ces quartiers déshérités, on sait ce que l’on doit à l’Ecole et aux services publiques. Et on connait le sens de l’impôt.
En dissimulant, en mentant, c’est l’idée même de communauté de destin qu’ils assassinent.
Y.S
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