

Éric de Dadelsen, comédien,metteur en scène et initiateur de projets, a un parcours multiculturel qui commence par Strasbourg, passe par Vire, directeur du Centre Dramatique du Préau et continue, par l’artistique au Théâtre de la Bouche d’Or et les prises de position, toujours engagées et motrices.
Voici sa déclaration sur les retraites et .. le reste.
La stratégie n’est pas nouvelle mais elle a parfois fait ses preuves. Pas toujours, puisque le grand Charles de Gaulle lui-même en avait fait les frais. (…)
Le jeune émule du général qui aujourd’hui préside aux destinées de notre pays reprend la formule à son compte pour faire passer son projet d’enterrer au plus vite le régime solidaire des retraites par répartition. Il sait bien que son argument de suppression des régimes spéciaux au nom d’une pseudo- équité a bonne presse dans l’opinion publique, peu ou prou. Il sait aussi que les français, pour la plupart, ne sont pas dupes de son projet libéral de liquidation des régimes solidaires, notamment les retraites. Dès lors, alors qu’il pourrait séparer ces deux questions qui n’ont rien à voir ensemble, il accouple de façon obligatoire la question des régimes spéciaux et la réforme générale des retraites. Ainsi il n’hésite pas à dénoncer le mouvement social du 05 décembre 2019 comme étant une défense corporative des régimes spéciaux et non une remise en question de sa prétendue réforme équitable.
Les régimes « spéciaux »
En fait, si l’on prend la question du point de vue des salariés, les régimes spéciaux sont justement l’un des derniers remparts contre un système de nivellement des retraites pas le bas. Pire encore le projet de l’exécutif dans son système de points, sous prétexte d’une adéquation à la réalité du terrain, donc à une forme de justice de « tu touches en fonction de ce que tu as gagné » gomme toute forme de corrections des inégalités sociales et salariales. Le projet en question au contraire garantit la reconduction des inégalités criantes et scandaleuses dans l’échelle des salaires dans le cadre des retraites. La dimension solidaire cède une fois encore le pas à la logique comptable d’une société totalement inégalitaire.
Pourtant, l’élaboration des régimes spéciaux a été justement dictée par le souci des organismes paritaires de corriger des inégalités évidentes. Au-delà de la pénibilité, souvent seul argument avancé, il y a par exemple, des métiers qu’il ne fait pas toujours bon pratiquer, passé un certain âge. Est-ce qu’un éducateur spécialisé ou un instituteur sont toujours aussi motivés et opérationnels auprès des jeunes, avec le choc générationnel, après 55 ans ? Permettez-moi d’en douter. Il est de bon sens de se dire que certains d’entre eux sont peut-être encore à leur place mais que pour beaucoup d’autres, l’on devrait valoriser plutôt leur expertise et leur expérience dans des tâches et des fonctions plus en distance. Evidemment des jeunes godelureaux comme ceux qui nous dirigent n’ont pas et ne peuvent pas avoir, à leur décharge, suffisamment de vécu et de sagesse pour comprendre et analyser cela.
L’ignorance de la réalité

Et d’ailleurs, le pourraient-ils, ils ne le feraient pas. Car au lieu de mettre les choses à plat, ils partent de préjugés et de principes figés dans leurs esprits inadaptés au réel d’un monde du travail que dans le fond ils ne connaissent pas. Le problème des financements, comme l’exprime très bien le haut- commissaire aux retraites et le C.O.R., est plus un problème de recettes que de dépenses. Le gouvernement actuel a creusé à nouveau un déficit profond dans le régime des retraites, pas parce que nous avons un différentiel actifs/retraités accru mais parce qu’il exonère à tour de bras les entreprises de leur part de cotisations. Est-ce que cette manne, enlevée aux salariés, et redonnée aux patrons, crée de l’emploi ? Non ou si peu. Est-ce que cet argent rend ces entreprises plus compétitives ? Globalement non. Est-ce que cela augmente les dividendes des actionnaires ? Oui et massivement. Les chiffres le démontrent.
Le coût des régimes spéciaux, chacun s’entend à le constater, surtout quand on parle des cheminots, est minime au regard de la durée et la qualité de vie que cela peut apporter à ces salariés. En revanche, le coût des retraites chapeaux et des parachutes dorés est énorme pour un si petit nombre de bénéficiaires. Si la question est bien, et nul raison d’en douter un problème de recettes, allons chercher l’argent où il est.
Les possibles
Si les femmes étaient payées à fonction et compétence identique à l’égal des hommes, cela serait déjà un gain de cotisation considérable. Si la part patronale était rétablie à sa juste valeur, cela serait aussi un gain conséquent. Si une part de cotisation en direction de la solidarité nationale était prélevée sur l’ensemble des profits des actionnaires, là nous aurions un sacré matelas pour financer la solidarité nationale et particulièrement les retraites. Si enfin on prélevait d’une façon bien plus autoritaire, et non soumise au diktat américain, une cotisation sociale sur les flux financiers et les bénéfices immatériels en général, le bonheur du peuple en ce qui concerne la vie quotidienne serait largement et équitablement assuré. Si pour en finir il y avait un vrai partage des bénéfices avec les salariés, alors l’horizon serait totalement dégagé. Et le mensonge éhonté que chacun gobe bêtement parce que cela sonne comme du bon sens que parce qu’on vit plus vieux on doit travailler plus longtemps ferait vite chou blanc. Car cette question peut apparaître si l’on a un authentique déficit démographique. Ce n’est pas notre cas. En outre, et quoiqu’en pensent les populistes dans leur infinie démagogie, l’immigration est à même de régler cette question. A propos, allons-nous demander aux femmes de travailler plus longtemps parce que leur longévité est plus grande? Soyons sérieux.
La réalité et ses non-dits
La réalité est que l’exécutif veut faire payer au peuple toutes les factures. Il ne touche pas à l’âge légal mais il rajoute des trimestres et il décôte à partir d’un certain âge. C’est-à-dire soit il encourage à partir plus vieux soit il précarise les retraités. Dans les deux cas possibles, il nous gruge. Il rallonge les annuités. En Allemagne, 35 annuités nécessaires, en France 42. Il utilise l’argument des études longues pour prolonger la durée du travail. Pourquoi, comme en Allemagne, ne pas prendre en compte les années d’études dans le calcul de la retraite ? A partir de ce système j’ai des amis allemands qui gagnent bien plus à la retraite que lorsqu’ils étaient en activité. Trouvez-moi un seul cas similaire en France. Enfin, on le sait bien, la plupart des gens qui se retrouvent au chômage à 57 ans sont définitivement spoliés et réduits à la pauvreté.
Qui prend l’argent et comment est-il distribué
Au lieu d’une proposition prometteuse et vraiment équitable, la réforme que prévoit l’exécutif aujourd’hui, comme toutes les prétendues réformes qu’il envisage, c’est la mise en place de système qui permettent de donner au peuple sous forme d’avantage social une petite part de l’argent qu’on lui a pris dans les impôts et taxes dont chacun est bien obligé de reconnaître qu’ils nous désignent comme les champions du monde de la contribution publique. Quand la société a besoin d’argent, l’exécutif fait un projet de loi : ça ne coûte rien, ça n’engage à rien. Quand la société a besoin de solidarité, l’exécutif va chercher l’argent dans la poche des classes moyennes, des contribuables.
Réagissons !
Sommes-nous assez sots pour ne pas voir le pot aux roses ? Sommes-nous assez serviles pour accepter cette manipulation d’illusionniste de bas étage ? Sommes-nous assez égoïstes pour ne pas comprendre que nous jetons nos enfants et petits-enfants en pâture aux exploiteurs des masses populaires qui nous méprisent et nous dirigent aujourd’hui ? Combien de temps encore allons-nous accepter cette spirale descendante de nos intérêts et de nos valeurs ? Ne me parlez pas de violence, la pire des violences vient des affameurs du peuple qui nous manipulent et nous dépouillent sans vergogne.